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SOMMAIRE




CHAPITRE   V


Des conséquences de l'autodétermination

Dés l'annonce officielle prévue à l'article 27 du règlement de l'autodétermination, les actes correspondant à ces résultats seront établis.
Si la solution d'indépendance et de coopération est adoptée:
- l'indépendance de l'Algérie sera immédiatement reconnue par la France;
- les transferts de compétence seront aussitôt réalisés;
- les règles énoncées par la présente déclaration générale et les déclarations jointes entreront en même temps en vigueur.
L'Exécutif provisoire organisera, dans un délai de trois semaines, des élections pour la désignation de l'Assemblée nationale algérienne à laquelle il remettra ses pouvoirs.


B) DÉCLARATION DES GARANTIE

PREMIÈRE PARTIE


DISPOSITIONS GÉNÉRALES

1° De la sécurité des personnes


Nul ne peut être inquiété, recherché, poursuivi, condamné, ou faire l'objet de décision pénale, de sanction disciplinaire ou de discrimination quelconque, en raison d'actes commis en relation avec les événements politiques survenus en Algérie avant le jour de la proclamation du cessez-le-feu. (Pourtant beaucoup de Français restèrent emprisonnés jusqu'en 1968, et ne furent amnistiés qu'en 1982. Certains furent même fusillés en juillet 62 pour des actes commis avant l'indépendance.)
Nul ne peut être inquiété, recherché, poursuivi, condamné, ou faire l'objet de décision pénale, de sanction disciplinaire ou de discrimination quelconque, en raison de paroles ou d'opinions en relation avec les événements politiques survenus en Algérie avant le jour du scrutin d'autodétermination.

2° De la liberté de circuler entre l'Algérie et la France

Sauf décision de justice, tout Algérien muni d'une carte d'identité est libre de circuler entre l'Algérie et la France.
Les Algériens sortant du territoire algérien dans l'intention de s'établir dans un autre pays pourront transporter leurs biens mobiliers hors d'Algérie.
Ils pourront liquider sans restrictions leurs biens immobiliers et transférer les capitaux provenant de cette opération dans les conditions prévues par la Déclaration de principes relative à la coopération économique et financière.
Leurs droits à pension seront respectés dans les conditions prévues dans cette même déclaration.


DEUXIÈME PARTIE

CHAPITRE PREMIER

De l'exercice des droits civiques algériens

Dans le cadre de la législation algérienne sur la nationalité, la situation légale des citoyens français de statut civil de droit commun (les Pieds Noirs) est réglée selon les principes suivants:
Pour une période de trois années à compter de l'autodétermination, les citoyens français de statut civil de droit commun :
- nés en Algérie et justifiant de dix années de résidence habituelle et régulière sur le territoire algérien au jour de l'autodétermination;
- ou justifiant de dix années de résidence habituelle et régulière sur le territoire algérien au jour de l'autodétermination, et dont le père ou la mère, né en Algérie, remplit ou aurait pu remplir les conditions pour exercer les droits civiques;
- ou justifiant de vingt années de résidence habituelle et régulière sur le territoire algérien au jour de l'autodétermination, bénéficieront, de plein droit, des droits civiques algériens et seront considérés de ce fait comme des nationaux français exerçant les droits civiques algériens.
Les nationaux français exerçant les droits civiques algériens ne peuvent exercer simultanément les droits civiques français.
Au terme du délai de trois années susvisé, ils acquièrent la nationalité algérienne par une demande d'inscription ou de confirmation de leur inscription sur les listes électorales; à défaut de cette demande, ils sont admis au bénéfice de la convention d'établissement.


CHAPITRE II

Protection des droits et libertés des citoyens algériens (les Pieds Noirs)
de statut civil de droit commun

Afin d'assurer aux Algériens de statut civil de droit commun la protection de leurs personnes et de leurs biens et leur participation harmonieuse à la vie de l'Algérie, les mesures énumérées au présent chapitre sont prévues.
Les nationaux français exerçant les droits civiques algériens dans les conditions prévues au chapitre I ci-dessus, bénéficient de ces mêmes mesures.
l. Les Algériens de statut civil de droit commun jouissent du même traitement et des mêmes garanties en droit et en fait que les autres Algériens. Ils sont soumis aux mêmes devoirs et aux mêmes obligations.
2. Les droits et libertés définis par la Déclaration universelle des Droits de l'Homme sont garantis aux Algériens de statut civil de droit commun.
Il ne peut être pris à leur égard, notamment, aucune mesure discriminatoire en raison de leur langue, de leur culture, de leur religion, et de leur statut personnel. Ces traits caractéristiques leur sont reconnus et doivent être respectés.
3. Les Algériens de statut civil de droit commun seront, pendant cinq ans, dispensés du service militaire.
4. Les Algériens de statut civil de droit commun ont une juste part à la gestion des affaires publiques, qu'il s'agisse des affaires générales de l'Algérie ou de celles des collectivités locales, des établissements publics et des entreprises publiques.
Dans le cadre d'un collèges électoral unique commun à tous les Algériens, les Algériens de statut civil de droit commun jouissent de l'électorat et de l'éligibilité.
5. Les Algériens de statut civil de droit commun ont, dans toutes les assemblées à caractère politique, administratif, économique, social et culturel, une juste et authentique représentation.
a) Dans les assemblées à caractère politique et dans les assemblées à caractère administratif (conseils régionaux, généraux et municipaux), leur représentation ne pourra être inférieure à leur importance au sein de la population. A cet effet, dans chaque circonscription électorale, un certain nombre de sièges à pourvoir sera, selon 1a proportion des Algériens de statut civil de droit commun dans cette circonscription, réservé aux candidats algériens de ce statut, quel que soit le mode de scrutin choisi.
b) Dans les assemblées à caractère économique, social et culturel, leur représentation devra tenir compte de leurs intérêts moraux et matériels.
6 a) La représentation des Algériens de statut civil de droit commun au sein des assemblées municipales sera proportionnelle à leur nombre dans la circonscription considérée.
b) Dans toute commune où il existe plus de 50 Algériens de statut civil de droit commun et où ceux-ci, nonobstant l'application des dispositions de l'article 5 ci-dessus, ne sont pas représentés au sein de l'assemblée municipale est désigné un adjoint spécial appelé à y siéger avec voix consultative.
Est proclamé adjoint spécial, à l'issue des élections municipales, 1e candidat algérien de statut civil de droit commun qui a recueilli le plus grand nombre de voix.
c) Sans préjudice des principes admis au paragraphe a) ci-dessus, et pendant les quatre années qui suivront 1e scrutin d'autodétermination, les villes d'Alger et d'Oran seront administrées par des conseils municipaux dont le président ou 1e vice-président sera choisi parmi les Algériens de statut civil de droit commun ( les Pieds Noirs).
Pendant ce même délai, les villes d'Alger et d'Oran sont divisées en circonscriptions municipales dont le nombre ne sera pas inférieur à 10 pour Alger et à 6 pour Oran.
Dans les circonscriptions où la proportion des Algériens de statut civil de droit commun dépasse 50 %, l'autorité placée à la tête de la circonscription appartient à cette catégorie de citoyens.
7. Une proportion équitable d'Algériens de statut civil de droit commun sera assurée dans les différentes branches de la fonction publique.
8. Les Algériens de statut civil de droit commun sont en droit de se prévaloir de leur statut personnel non coranique jusqu'à la promulgation en Algérie d'un code civil à l'élaboration duquel ils seront associés.
9. Sans préjudice des garanties résultant, en ce qui concerne la composition du corps judiciaire algérien, des règles relatives à la participation des Algériens de statut civil de droit commun au sein de la fonction publique, les garanties spécifiques suivantes sont prévues en matière judiciaire:
A) Quelle que puisse être l'organisation judiciaire future de l'Algérie, celle-ci comportera, dans tous les cas, en ce qui concerne les Algériens de statut civil de droit commun :
- 1e double degré de juridiction, y compris en ce qui concerne les juridictions d'instruction;
- le jury en matière criminelle;
- les voies de recours traditionnelles : pourvoi en cassation et recours en grâce.
B) En outre, dans l'ensemble de l'Algérie :
a) Dans toute juridiction civile ou pénale, devant laquelle devra comparaître un Algérien de statut civil de droit commun, siégera obligatoirement un juge algérien de même statut. En outre, si la juridiction de jugement comporte un jury, 1e tiers des jurés seront des Algériens de statut civil de droit commun.
b) Dans toute juridiction pénale siégeant à juge unique devant laquelle comparaît un Algérien de statut civil de droit commun et dans laquelle le magistrat ne serait pas un Algérien de même statut, le juge unique sera assisté d'un échevin choisi parmi les Algériens de statut civil de droit commun et qui aura voix consultative.
c) Tout litige intéressant exclusivement le statut personnel des Algériens de statut civil de droit commun sera porté devant une juridiction composée en majorité de juges relevant de ce statut.
d) Dans toutes les juridictions où est requise la présence d'un ou plusieurs juges de statut civil de droit commun, ceux-ci peuvent être suppléés par des magistrats français détachés au titre de la coopération technique.
10. L'Algérie garantit 1a liberté de conscience et 1a liberté des cultes catholique, protestant, et israélite. Elle assure à ces cultes la liberté de leur Organisation, de leur exercice et de leur enseignement ainsi que l'inviolabilité des lieux du culte.
11. a) Les textes officiels sont publiés ou notifiés dans la langue française en même temps qu'ils le sont dans la langue nationale. La langue française est utilisée dans les rapports entre les services publics algériens et les Algériens de statut civil de droit commun. Ceux-ci ont le droit de l'utiliser, notamment dans la vie politique, administrative et judiciaire.
      b) Les Algériens de statut civil de droit commun exercent librement leur choix entre les divers établissements d'enseignement et types d'enseignement.
      c) Les Algériens de statut civil de droit commun, comme les autres Algériens, sont libres d'ouvrir et de gérer des établissements d'enseignement.
      d) Les Algériens de statut civil de droit commun pourront fréquenter les sections françaises que l'Algérie organisera dans ses établissements scolaires de tous ordres conformément aux dispositions de la Déclaration de principes relative à la coopération culturelle.
     e) La part faite par la radiodiffusion et la télévision algériennes aux émissions en langue française devra correspondre à l'importance qui est reconnue à celle-ci.
12. Aucune discrimination ne sera établie à l'égard des biens appartenant à des Algériens de statut civil de droit commun, notamment en matière de réquisition, de nationalisation, de réforme agraire et d'imposition fiscale.
Toute expropriation sera subordonnée à une indemnité équitable préalablement fixée.
13. L'Algérie n'établira aucune discrimination en matière d'accès à l'emploi. Aucune restriction à l'accès d'aucune profession, sauf exigence de compétence, ne sera établie.
14. La liberté d'association et la liberté syndicale sont garanties. Les Algériens de statut civil de droit commun ont le droit de créer des associations et des syndicats et d'adhérer aux associations et syndicats de leur choix.

CHAPITRE   III

De l'association de sauvegarde

Les Algériens de statut civil de droit commun appartiennent, jusqu'à la mise en vigueur des statuts, à une association de sauvegarde reconnue d'utilité publique et régie par le droit algérien.
L'Association a pour objet:
- d'ester en justice, y compris devant la Cour des garanties pour défendre les droits personnels des Algériens de statut civil de droit commun, notamment les droits énumérés dans la présente déclaration;
- d'intervenir auprès des Pouvoirs publics;
- d'administrer des établissements culturels et de bienfaisance.
L'Association est dirigée, jusqu'à l'approbation de ses statuts par les autorités compétentes algériennes, par un comité directeur de neuf membres désignés par tiers respectivement par les représentants de la Vie spirituelle et intellectuelle, de la magistrature ainsi que de l'ordre des avocats.
Le comité directeur est assisté par un secrétariat responsable devant lui; il peut ouvrir des bureaux dans les différentes localités.
L'Association n'est ni un parti ni un groupement politique. Elle ne concourt pas à l'expression du suffrage.
L'Association sera constituée dès l'entrée en vigueur de la présente déclaration.


CHAPITRE   IV

De la Cour des garanties

Les litiges sont, à la requête de toute partie algérienne intéressée, déférés à la Cour des garanties.   Celle-ci est composée :
- de quatre magistrats algériens dont deux appartenant au statut civil de droit commun, désignés par le gouvernement algérien;
- d'un président désigné par le gouvernement algérien sur proposition des quatre magistrats.
La Cour peut délibérer valablement avec une composition de trois membres sur cinq au minimum.
Elle peut ordonner une enquête.
Elle peut prononcer l'annulation de tout texte réglementaire ou décision individuelle contraire à la Déclaration des garanties.
Elle peut se prononcer sur toute mesure d'indemnisation
Ses arrêts sont définitifs.

TROISIÈME PARTIE

FRANÇAIS RÉSIDANT EN ALGÉRIE EN QUALITÉ D'ÉTRANGERS

Les Français, à l'exception de ceux qui bénéficient des droits civiques algériens, seront admis au bénéfice d'une convention d'établissement conforme aux principes suivants:
1. Les ressortissants français pourront entrer en Algérie et en sortir sous le couvert, soit de leur carte d'identité nationale française, soit d'un passeport français en cours de validité. Ils pourront circuler librement en Algérie et fixer leur résidence au lieu de leur choix.
Les ressortissants français résidant en Algérie, qui sortiront du territoire algérien en vue de s'établir dans un autre pays, pourront transporter leurs biens mobiliers, liquider leurs biens immobiliers, transférer leurs capitaux, dans les conditions prévues au titre III de la Déclaration de principes relative à la coopération économique et financière et conserver le bénéfice des droits à pension acquis en Algérie, dans les conditions qui sont prévues dans la Déclaration de principes relative à la coopération économique et financière.
2. Les ressortissants français bénéficieront en territoire algérien de l'égalité de traitement avec les nationaux en ce qui concerne :
- la jouissance des droits civils en général;
- le libre accès à toutes les professions assorti des droits nécessaires pour les exercer effectivement, notamment celui de gérer et de fonder des entreprises;
- le bénéfice de la législation sur l'assistance et la sécurité sociale;
- le droit d'acquérir et de céder la propriété tous biens meubles et immeubles, de les gérer, d'en jouir; sous réserve des dispositions concernant la réforme agraire.
3. a) Les ressortissants français jouiront en territoire algérien de toutes les libertés énoncées dans la Déclaration universelle des Droits de l'Homme.
b) Les Français ont le droit d'utiliser la langue française dans tous leurs rapports avec la justice et les administrations.
c) Les Français peuvent ouvrir et gérer en Algérie des établissements privés d'enseignement et de recherche, conformément aux dispositions prévues dans la Déclaration de principes relative à la coopération culturelle.
d) L'Algérie ouvre ses établissements d'enseignement aux Français. Ceux-ci peuvent demander à suivre l'enseignement dispensé dans les sections prévues à la Déclaration de principes relative aux questions culturelles.
4. Les personnes, les biens et les intérêts des ressortissants français seront placés sous la protection des lois, consacrée par le libre accès aux juridictions.
Ils seront exemptés de la caution   
judicatum solvi.
5. Aucune mesure arbitraire ou discriminatoire ne sera prise à l'encontre des biens, intérêts et droits acquis des ressortissants français. Nul ne peut être privé de ses droits, sans une indemnité équitable préalablement fixée.

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